Le Bandit, vous y êtes allés 1 fois, 50 fois ou plus ... pour assister à un concert, pour boire un verre, pour d’autres raisons (avouables ou non) ... On vous invite dans cette rubrique à rédiger 1 ligne, 50 lignes ou plus ... pour en faire le récit, pour évoquer quelques anecdotes (même inavouables, il y a prescription !) ...
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Hervé PETIT :
« Le Bandit ? De grands moments de découvertes de groupes qu'on ne pouvait applaudir nulle part ailleurs. Le point de convergence des fêtards, curieux, créateurs de vie à Strasbourg. Un lieu interlope animé par la vivacité des esprits qui s'y côtoyaient ... »
---Laurence BARONDEAU :
« Bravo pour la documentation !
Il faudrait créditer les créateurs, en particulier celui des illustrations / tracts / fanzine / logo d'époque présentés ici, l'illustre illustrateur Didier RINALDI alias le grand GRANDBLAIR !!!»
---Eric T. LURICK :
« Ma mémoire me joue des tours. Qui étions-nous allé voir au Hall Tivoli en ce début de l'année 1983 ? Les Stranglers ? Ou bien mon subconscient cherche-t-il à enfouir un nom complètement inavouable ? Peu importe finalement...
Dans la foule uniforme qui innonde la rue après le concert - les cheveux mi-longs, le treillis militaire, le jean délavé et les baskets Stan Smith sont encore la norme - je repère une poignée de personnes distribuant des tracts qui se distinguent de ce tout venant vestimentaire. En m'approchant je m'aperçois que je connais l'un d'entre eux. C'est Didier. Il me tend un tract et me recommande vivement de venir faire un tour dans le club rock qu'il vient d'ouvrir avec ses amis en me promettant que je ne le regretterais pas. Moi qui croyais que le peu de vie rock à Strasbourg avait lieu dans une zone restreinte qui part du Wacken, entre le Hall Tivoli et le Hall Rhenus, jusqu'au Palais des Fêtes. Mes amis et moi-même lui promettont de venir.
Le vendredi suivant nous voilà au 22 rue de Bouxwiller devant le Bandit, à l'heure dite, à gravir l'escalier aussi raide que interminable. Quelqu'un nous ouvre la porte sans dire un mot - je comprendrais plus tard pourquoi – nous payons et nous voilà enfin dans le Saint des Saints. Au fond une petite scène, à gauche le bar, à droite, dans un recoin, une petite cabine de DJ, quelques fauteuils. Ce qui me frappe le plus se sont ces gros bidons disposés ça et là dans ce lieu complètement vide.
Car nous sommes seuls ! Dans le doute, l'un de nous sort le tract de sa poche pour vérifier la date et l'heure. C'est bien le bon jour et il est bien 21 heures ! Un peu inquiets nous décidons de nous diriger vers le bar lorsque quatre punks sortent de la pénombre et nous toisent de haut en bas la moue aux lèvres. Il faut dire que l'un de mes amis porte encore les cheveux longs et une barbe. Probablement un reliquat de ses années passées à écouter du krautrock ! Je connais l'un de ces punks qui fait mine de rien et je me dis que cela sera suffisant pour éviter une rixe éventuelle (ou une coupe de douille express). Pour nous donner de la prestance nous commandons une bière et attendons patiemment.
Après quelques verres l'endroit s'est peu à peu rempli et le groupe monte sur scène. Nous ne les connaissons pas - ce qui sera finalement assez souvent le cas en allant au Bandit. Ils viennent de Mulhouse et s'appellent Russian Roulette. D'emblée je sais que ça va me plaire. Un batteur, une bassiste et deux guitaristes au look sans équivoque. Entre Johnny Thunders et Stiv Bators. La couleur est donnée ! Durant l'intro le chanteur bondit sur scène et... comment dire... le contraste avec le reste de la bande est saisissant. Perfecto, tartan et iroquois énorme. J'ai l'impression de voir les Heartbreakers avec un membre de Exploited qui s'est égaré là et qui en profite pour squatter le micro en jubilant ! Le concert se termine avec une reprise de "Gloria" pendant laquelle le chanteur déverse sur les pogoteurs le contenu de boîtes de lait en poudre... Gloria.
Nous voilà conquis. Ou convertis. A partir de ce moment je vais vraiment avoir du mal à assister à un concert dans une salle de plus grande capacité. Le prochain au même endroit ? Les Désaxés. Et nous savons maintenant qu'il ne faut pas tenir compte des horaires annoncés ! »
Pascal HOLTZER (ALESIA COSMOS et CAPITAL FUNK):
« 1983 ? 30 ans... la mémoire ne remonte pas si loin ! C'est ma première réaction. Et pourtant, je sens que ça s'agite, pousse et rue tout au fond du grenier, quelque part entre le cortex préfrontal et l'hippocampe se forment des images de Peugeot 504, de Simca 1100, et la tête de Pierre Mauroy à la télé, ça y est, ça commence à circuler dans les réseaux neuronaux...
Je m'aventure, dépoussière et trouve quelques vieux trucs sinistres de cette année-là : la disparition de Tennesse Williams, l'avènement de Margaret Thatcher ; une bonne nouvelle aussi : l'incarcération de Klaus Barbie, « le boucher de Lyon ». Et plus loin, sous une photo de ma première Strato (noire), War, le deuxième album de U2 et la VHS de Thriller de Michael Jackson.
Mes narines frémissent et mes connexions synaptiques grésillent, je sens que je m'approche...
Et tout-à-coup, le voilà : le Bandit. Je me laisse glisser le long de la voie ferrée sans crier gare et, telle la vache contemplative, laisse rouler les wagons de souvenirs.
C'est d'abord un fatras de sons, d'images et de sensations. Je me dis que je n'y arriverai pas. J'inspire, tente de faire résonner un La 440 dans la posture du lotus, et me laisse faire. Et ça explose, c'est la Foire du Trône sous acide. Tout se mélange. Arno avec Dr Feelgood ? Je rêve ! Arno ? Oui, ça me revient, mais avec TC Matic ! Et Dr Feelgood, dire que j'avais oublié... Et, toujours en première classe, arrivent Kas Product, Alan Vega, Jad Wio. Les potes de Kat Onoma, aussi.
Et subitement, le fait d'évoquer ceux-là me fait exploser à la figure que j'y ai joué avec 2 de mes groupes, la même année, en 85. Le plus drôle dans l'histoire, c'est que ces 2 formations ne jouaient pas du rock, pas au sens strict, en tous cas : ALESIA COSMOS (en trio à l'époque, avec Marie-Berthe Servier et Bruno de Chénerilles) pratiquait un cocktail (hallucinant pour les uns, cauchemardesque pour les autres) de free-rock mâtiné d'electro avant l'heure et de bidouillages électro-acoustiques accouplés avec les folles impros vocales de la chanteuse (wow, j'ai réussi à en parler, à l'époque, j'avais du mal...). Et CAPITAL FUNK (avec le même Bruno de Chénerilles, Ismaïl Safwan, Etienne Jesel et le fameux Roland qui jouait avec tout le monde à l'époque... une boîte à rythmes en guise de batteur, signe des temps) qui jouait du funk dans la lignée de ceux qu'on aimait à l'époque : Prince Charles, Was Not Was, Nona Hendryx, War ou Parliament. Curieusement, je me souviens très mal de ces concerts. On a joué beaucoup cette année-là.
Du Bandit, il me reste le souvenir de l'état dans lequel j'y allais. Le quartier, d'abord : une zone d'entrepôts en activité ou non, des bâtiments patibulaires qui s'alignaient mystérieusement comme autant de menaces pour le petit bourgeois qui considérait le rock comme un truc dangereux pour sa voiture, sa femme et ses enfants. Par temps maussade, c'était splendide, un vrai décor de film de bandits. Quand on pénétrait dans cette zone, on se transformait immanquablement en outlaw, prêt à en découdre avec les décibels, et éventuellement avec le petit bourgeois sus-cité. J'ai peu de souvenirs de l'architecture intérieure du lieu (30 ans quand même !), mais il me reste celui des groupes qui m'ont allumé avec la plus grande flamme qui soit : le rock.
« Le rock est la foutue meilleure drogue du monde » (Angus Young). »
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Francis LEIBENGUTH (1) :
« Ah ! Les Soirées de l’APRA ! Une fois par semaine, le jeudi je crois, l’Association pour la Promotion du Rock en Alsace organisait un concert gratuit au Bandit, avec en vedette un groupe « local » (comprenez : groupe alsacien qui n’était encore jamais sorti de son garage). Je me souviens d’un groupe baba cool où les spectateurs étaient assis par terre, d’un groupe punk plutôt pas mal (Redrum), mais le grand moment fut pour moi la prestation de Golgotha, groupe strasbourgeois de hard rock qui ne nous épargna aucun cliché : l’arrivée des musiciens sur « Ainsi parlait Zarathoustra », les fumigènes et les gros pétards, le guitariste avec le pantalon collant à rayures verticales (très à la mode chez les hardos dans les années 80), spécialiste des soli hyper techniques qui n’en finissent plus, le headbanging évidemment, etc. Mais le meilleur (ou le pire, c’est selon) fut l’arrivée sur scène du chanteur après un premier morceau instrumental : cheveux longs, barbe, habillé dans une espèce de costume 2 pièces blanc style oriental sans doute acheté à Pier Import, avec une croix celtique ou quelque chose de ce genre autour du cou (je vous rappelle le nom du groupe : Golgotha, vous voyez la référence ?). Bref, du grand spectacle ! Il salue la foule, vient serrer les mains des spectateurs du premier rang (sans doute les fans de son quartier), et, l’intro du deuxième morceau terminée, il se met alors à chanter… Euh… Bon. Comment décrire son « style vocal » ? Je dirais quelque chose entre un Jimmy Sommerville sous amphet et un Christian Vander sous acide, bref une voix suraigüe avec laquelle il essaie de vocaliser, et tout cela avec le plus grand sérieux bien sûr. Un grand moment de « non sense » que n’auraient sans doute pas renié les Monty Python, sauf qu’ici, c’était du premier degré. Les premières minutes de fascination passées (oui oui, je dis bien fascination, c’est vous dire l’effet visuel et auditif de cette scène), et après avoir bien rigolé pendant quelques temps, je suis sorti discuter avec les potes, mais j’ai eu la chance de revenir juste au moment du slow (parce que, vous voyez, les hardos, sous le cuir et les clous, ce sont quand même de grands sentimentaux). Son titre : Shadows in the Night… Tous les clichés, vous dis-je. »
---Francis LEIBENGUTH (2) :
« Je me souviens aussi de ce concert des WDC. Le bassiste s'appelait Lior et jouait en pyjama, le saxophoniste s'était fabriqué un lance-flammes avec un aérosol et un briquet et courait derrière le chanteur pour lui cramer sa banane, et le groupe lançait des légumes dans la foule qui les relançait sur la scène (c'était à la sortie de leur album "Go Vegetables Go"). Un immense bordel, et sans doute le concert le plus drôle que j'ai jamais vu.»
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Serge GREMILLET (batteur de M ET LES MAUDITS):
« Voici un souvenir assez précis du Bandit: Nous jouions ce soir là en première partie des Fixed-Up, groupe du Havre, mélange de rythm and blues speedé et de power pop. 3 musicos hyper technique. Ils font la balance en premier. Les mecs nous foutent les chocottes, en 2 temps 3 mouvements ils te balancent 2 morceaux hyper-pro. Ils sont 3 mais j'ai l'impression qu'ils sont au moins le double. Des techniciens, mais avec beaucoup de feeling. On n'en ramenait pas large. On fait notre balance, avec encore le souvenir de la balance des Fixed-Up et on est fébrile. Après, backstage, les 3 mecs de Fixed-up ne décrochent pas un mot. Le genre de mecs qui vivent rock, bouffent rock, boivent rock, pensent rock mais taciturnes. Ils avaient déjà la tête dans leur concert. Leur mutisme nous a encore plus foutu les boules. On est monté sur scène, on a fait dans notre froc et tout le monde a mal joué, le pire set de notre vie ! Ils sont venu après et ont réalisé leur set, du tonnerre ! Pour la ptite histoire on a terminé la nuit chez notre bassiste. Le chanteur-guitariste a passé la nuit a passer des disques et à boire des bières, sans dire un mot. Heureusement les 2 autres étaient un poil plus bavard, mais guère plus. Ceci dit, des gars sympas, quand-même. Mais parler n'était pas trop leur truc!»
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QUIET DOG :
« Je me souviens d’un concert des Washington Dead Cats quelque peu tendu. Entre les morceaux, le chanteur agacé de jouer devant un public qu’il devait juger pas assez nombreux, s’adressait aux spectateurs avec un ton de reproche quasi insultant. Sauvage le matou, psychobilly mais pas très psychologue : depuis quand les présents ont-ils tort ? »---
Ziane GRINI :« Ah le Bandit! J'y ai fait pas mal de mes premières sorties à Strasbourg à partir de 1983. Je ne me souviens pas de tout ce que j'y ai vu ou deviné à travers la fumée et mon aura éthylique... ah si, dans le genre inavouable: les débuts de Raft avant leur tube "planétaire". »
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Cécile COIFFARD (chanteuse de CANDIDATE):
« Un des souvenirs les plus rigolos avec Candidate, c'est un concert en 1986 à Strasbourg au Bandit. Sur un set de 15 titres, on n'a réussi à jouer qu'un seul morceau en entier, le reste s'est transformé en hystérie générale : Toutes les filles devant Bidou et tous les garçons devant moi à hurler. Moi qui étais très traqueuse sur scène, je n'avais jamais autant ri que pendant ce concert. Tout partait en vrille et plus on pataugeait, plus on était plié en 4. Inoubliable! On a fini au petit matin avec nos potes et nos fans à faire la route des vins en Alsace... Boire et conduire, ça se faisait encore à l'époque ! »
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Laurent HIRN (guitariste de RUPTURE):
« Etonnant retour dans le passé, heureux de nous en rafraîchir la mémoire. »
--- Romain CREUTZMEYER :
« Mon premier happening et ma première soirée au Bandit en 1986 !
Jeune Colmarien à 18 ans un jeudi de septembre 1985 vers 17h45 je débarque à Strasbourg censé y poursuivre mes études en Arts plastiques à la FAC… Mouais…
Certes, mais avant toutes choses après mon inscription rapide à la fac et la recherche d’un toit trouvé route du Polygone, affamé et assoiffé de rencontres, j’essaime les troquets et bouis-bouis strasbourgeois ou je fais la connaissance de quelques Zoulous de ma trempe avec qui bientôt je sympathise.
Il me faut un peu de temps, car le Colmarien est franchement déjanté et encore un tantinet agressif envers les barbares « béxers » Strasbourgeois.
Je découvre la faune Bas-Rhinoise et la vie nocturne de la capitale de basse Alsace et vu mon caractère trempé à et au blanc, les confrontations sont régulièrement teigneuses. Mais la sélection est rapide et ceux que j’ai rencontrés et avec lesquels j’ai eu plus que des mots et parfois des maux à l’époque, sont encore mes amis aujourd’hui…
Grâce à ces premiers piliers, je fais alors loin des chemins de la faculté, rapidement la connaissance de quelques fumeurs de bières, membres d’une troupe d’artistes-comédiens, saltimbanques-rêveurs sans compte et sans le sou, comme d’autres défoncés tous membres du collectif, « Trans Neuron Express » ! De loin souvent, car planant dans mes sphères peinturluresques et rarement de près, je me joins pourtant de temps en temps au groupe avec lequel j’arrive en fin de compte après plusieurs tentatives à communiquer, pour assister à des réunions artistico-culturelles…
Jusqu’au jour où un déjanté futur polytoxicomane notoire, le fameux Stuka de l’époque avec sa merde de Honda genre pseudo-sportive, membre actif et nerveux avec ses potes d’une association sise rue du Vieux Marché aux Vins me propose d’imaginer une intervention pour une soirée concert, intitulée « the Night » avec en tête d’affiche le groupe OTO !
Sitôt dit, sitôt trouvée, mais vu que cette idée supposait un minimum d’organisation et quelques deniers pour sa réalisation, j’en parle au collectif « Trans Neuron Express » dirigé par un certain Georges Lafflote qui n’en buvait pas et propose mon option de peinturlurage collectif et rigolo : Tous à poil on se court après et on se tartine de peinture au rythme de la musique !! L’idée plait, mais certaines minettes de la troupe un tantinet pudiques suggéreront l’utilisation d’artefacts en plastiques pour masquer les zizis qu’ils avaient plus petits que le mien…!
Ceci permettra la confection de costumes que nous présentons avec le concept aux responsables du Bandit. L’intervention est appréciée et acceptée illico !
Résultat, le soir du concert, après OTO, pour continuer cette soirée festive on s’est tous jeté sur la piste pour se peinturlurer et s’éclater comme des fous sur la musique des Résidents, devant un public ravi et stupéfié, qui n’en a pas perdu une goutte !
Le journaliste du coin a parlé dans son article de « prérégrinations » avec une faute d’orthographe, mais il voulait certainement parler de premières « pérégrinations aventureuses et frénétiques de sept intervenants d’un collectif expérimental Strasbourgeois, qui vêtus de combinaisons plastiques ont revisité l’univers avant-gardiste de San Francisco en s’appliquant à une performance picturale dynamique » ! Wouah !
À croire que le scribouillard avait déjà visité San Francisco, au moins dans ses rêves.
Je me souviens de certains qui ont participé à ce happening via l’article et les photos que je t’ai envoyé JL, mais depuis on s’est perdu de vue.
Au fait : Étienne, Jacques, Françoise et les autres aussi évidemment… si vous vous reconnaissez dans cette aventure, faites un coucou ! »NDLR : les photos de la performance évoquée par Romain sont ici :http://lebandit.blogspot.fr/2011/08/soirees-night-simple-detour.html ---
« Gin GORDON’S Ah! Le Bandit! Boire, boire, boire, entendre, écouter, écouter, regarder, regarder, être dans, être là où il faut, où il faut être à Strasbourg, un lieu qui n’existe plus heureusement, parce que mort d’une mort violente sans une petite fin ; Strasbourg n’a plus de ces endroits où il faut être pour être au centre du monde, au Bandit on y était, aujourd’hui Strasbourg est de nouveau une ville de passage, loin du monde, où je vous conseille ne pas vous arrêtez. Je ne bois plus de gin ...» ---
Jeannette GREGORI : « Le Bandit des années 85 et 86, ce sont quelques flashes qui me reviennent. Des réminiscences visuelles comme l’attroupement de jeunes gens avec des coiffures d’Iroquois bien sculptées, des perfectos noirs, le A d’anarchie qui apparaissait au dos des vestes de treillis, les cheveux décolorés des filles, leur maquillage outrancier… Les groupes comme Jazz Butcher ou Kat Onoma étaient si proches de la scène qu’on avait l’impression de partager avec eux un vrai moment d’intimité. Les filles s’éloignaient discrètement lorsque les pogos commençaient et allaient prendre un verre. Pendant une semaine au moins la qualité de la prestation scénique des musiciens allait alimenter nos conversations… Le Bandit, c’était aussi les amis qu’on retrouvait le temps d’un concert, ceux de la fac, ceux du lycée qui avaient fait le voyage depuis Metz ou Nancy. Enfin, le Bandit, c’était un formidable dérivatif dans une vie étudiante ponctuée de l’angoisse des partiels, des déjeuners régulièrement composés d’un sandwich jambon-beurre et d’un petit boulot pendant les congés scolaires comme agent de tri dans la librairie du coin… »
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Eric HILD :
« Je rentre de la Région Nord à l'été 84. Région si propice à la musique, aux fêtes. La Belgique ouvre ses boîtes à Minuit et ferme avec le dernier client. Je reviens hanter mon Strasbourg natal, cette ville de ploucs, persuadé de tout connaître.........Une courte réintégration à la vie nocturne, et en janvier 85, la déflagration : ce Bandit dont on m'avait chauffé le cuir réouvre ses portes.......... Un endroit qui autorise tout. La liberté comme mot d'ordre. Toutes les expériences artistiques sont permises. En y pensant, c'est une odeur, un son, une clope, un verre, une peinture, des potes, qui apparaissent dans un brouillard teinté de découvertes incessantes. Une certaine idée de la vie, optimiste, drôle et finalement assez sage. La fête sans SIDA, chômage, ou autres actuelles épées de Damoclès. Le rire érigé en habitude : je me souviens, ému, de Lisbet et de Carola, et des « guards », dans la folie furieuse du « Deep's Gang». Notre insatiable curiosité trouvait une source : on ne s'est pas gêné pour y plonger. Je retiens du Bandit et de ces deux années (puisque je n'ai pas connu 1983 et 1984) beaucoup plus qu'un endroit où écouter des concerts : un lieu de vie, tout simplement, dans lequel une jeunesse s'épanouissait à voir et écouter des talents, certes, mais surtout en se côtoyant, en s'interpellant, en riant. Là-bas, vivaient « the young men », fous de musiques différentes, avec la notion de partage. Ils ont vieilli, oui, mais ils n'oublient pas...... »---
Claude HAMM :« Une petite annecdote, qui s'est passée vers la fin du Bandit .... Les portiers n'étaient plus là tous les jours, et lors d'une soirée "psychédélique" on nous avait demandé à mon ami Bernard et à moi si nous voulions bien nous occuper de la porte. Aussitôt demandé, aussitôt fait. Nous voila dans le rôle de portiers, avec un saladier de cocktail de la soirée ... vert fluo si je me souviens bien, et très peu de clients. L'invitation était zébrée, et il en fallait une pour entrer. Un groupe de personnes s'approche, une jolie fille en premier, mais pas d'invitation ... Et mon ami Bernard en plaisantant qui dit "pas d'invitation et pas de minijupe .... Vous n'allez pas pouvoir rentrer". Le cocktail fluo aidant, nous venions de refuser l'entrée à Niagara (que nous n'avions évidemment pas reconnu), en concert à Strasbourg, et qui étaient les invités d'honneur de la soirée. Heureusement pour nous, le président de l'APRA (Cyril PRIEUR de mémoire) faisait partie du groupe, et nous a vite rappelé qui nous avions devant nous.»---
Marie-Pascale ENGELMANN :« Il était une fois une scène mythique légendaire époustouflante. Gravée à jamais dans nos mémoires d'adulescents des années 80. On a parlé des musiciens, on a parlé de la prog. ... On a juste oublié de parler des groupies. Des fans. Des filles. Toujours prêtes à arracher le tee-shirt de Lorenzi, la casquette de Poux ou d'espérer toucher la gratte au Christian ... La bienséance me demande de me taire. Cette marée féminine là au premier rang, dans une débauche de Pento, de perfecto et de piquants capillaires ...»
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